Maison DnA, BLAF architecten

    Comment rendre compatibles l'efficacité énergétique et le réemploi.

    Stijn Bollaert

    Le projet

    La performance énergétique des bâtiments, c'est-à-dire la quantité d'énergie qu'ils consomment lorsqu'ils sont utilisés, est le fer de lance de la politique de durabilité dans le secteur du bâtiment depuis le début du 21e siècle. Depuis 2011, un certificat "Performance Énergétique du Bâtiment" (PEB) est obligatoire pour les maisons à vendre et louer en Belgique. Ce document donne un aperçu de la consommation d'énergie d'un logement et des émissions de gaz à effet de serre qui y sont associées. Leur objectif : encourager les rénovations et les constructions économes en énergie. 

    L'efficacité énergétique commence par la réduction des pertes de chaleur à travers l'enveloppe du bâtiment. La principale solution utilisée à cette fin, encouragée par la réglementation, est l'isolation. Les panneaux d'isolation sont devenus de plus en plus épais au fil des ans, jusqu'à 35 centimètres ou plus dans les murs pour les maisons dites passives : des maisons qui ne nécessitent pratiquement pas d'énergie pour un climat intérieur qui répond à nos exigences actuelles de confort tout au long de l'année.

    Bien que l'efficacité énergétique des maisons (et des autres bâtiments) soit une préoccupation indéniable, certaines critiques pertinentes de cette approche ont été formulées depuis lors dans différents domaines. L'une d'entre elles concerne l'impact environnemental des matériaux nécessaires à ce changement. Qu'en est-il de l'énergie nécessaire à leur production ? Comment seront-ils traités, en fin de vie ? Et qu'en est-il de tous les matériaux évacués par les chantiers de  rénovation et de démolition, au profit d'une nouvelle construction ? Ce sont des questions de durabilité qui ne sont pas prises en compte par les réglementations PEB. 

    Pour le bureau d'architectes BLAF de Lokeren, très sensible aux principes de la construction passive, ces questions sont le point de départ d'une recherche à long terme qui guide et étaye la pratique de l’agence au quotidien. Depuis leur création en 2003, ils étudient des méthodes de conception et de construction dans lesquelles la performance énergétique ne se fait pas au détriment d'une matérialité et de flux de matériaux durables. 

    Dans la plupart des cas, les entreprises de construction développent des systèmes d’ancrages lourds afin de fixer des épaisseurs d’isolants toujours plus importantes sur les façades. Dans d’autres cas, la solution d’isolation réside dans une façade rendue plus mince et légère, qui serait comme une “veste bien isolante” [1]. La façade en briques empilées, l'une des caractéristiques principales de l'architecture belge (et des régions avoisinantes), "est de plus en plus remplacée par des matériaux minces et légers, et réduite à un revêtement" [2]. Les fabricants de briques, face à ce changement, se sont retrouvés contraints à développer de nouveaux produits tels que   les "bandes de briques". Il s'agit de "briques" d'une épaisseur moyenne de 1,5 cm, au lieu de 10, collées sur des panneaux isolants rigides pour donner l'impression d'une maçonnerie empilée. 

    Une colle fortement adhérente garantit que le lien entre la bande et l'isolation soit définitif. En fin de vie, les panneaux d'isolation et plus les plaquettes de briques finiront inévitablement dans la catégorie des "déchets mixtes" et seront au mieux incinérés. Tous deux sont impossibles à récupérer et à réutiliser. En outre, l'impact environnemental lié à la création des panneaux d'isolation rigides et des bandes de briques (principalement produites sous forme de briques entières, qui sont ensuite coupées pour ne laisser que les deux côtés et jeter les 7 cm du milieu) est important. 

    Le succès de ce produit n'est pas au rendez-vous. En effet, les constructeurs et les maîtres d'ouvrage continuent de revenir à la brique pour des raisons telles que la reconnaissance, la connotation de permanence et de robustesse, ou pour intégrer leur structure dans un contexte (de brique) plus large. Les alternatives ne sont pas toujours évidentes non plus. L'utilisation du bois (durable) nécessite souvent des traitements et un entretien supplémentaires ; la pierre naturelle, elle, est également  (trop) lourde.

    Stijn Bollaert
    BLAF

    La maison DnA de BLAF architecten est la première maison pour laquelle le cabinet applique une méthode de construction radicalement différente. En effet, c'est la façade qui joue ici le rôle de structure porteuse (et qui supporte donc le toit). La forme en croix de la maison, avec l'ajout minimal de poutres et de colonnes en béton dans le plan de briques, y contribue. Ce renversement complet des méthodes de construction traditionnelles, où la structure porteuse se trouve à l'intérieur de l'enveloppe du bâtiment, permet à BLAF de formuler une réponse productive à de nombreuses limitations inhérentes à la PEB. 

    Tout d'abord, la façade est constituée de briques de réemploi, cette méthode de construction est donc compatible avec les matériaux déjà présents dans notre environnement bâti et qui sont actuellement disponibles sur le marché du réemploi. Deuxièmement, l'enveloppe intérieure, réalisée en ossature bois, a pu être rendue très légère et donc économe en matériaux, puisque la structure n'a pratiquement que son propre poids à porter. Comme une boîte dans la  boîte, les enveloppes intérieures et extérieure fonctionnent indépendamment l'une de l'autre. Dans des projets ultérieurs réalisés selon la même méthode de construction, BLAF a commencé à utiliser des isolants en chaux et chanvre biosourcés. Toutes ces couches existent indépendamment les unes des autres et peuvent continuer à être traitées comme des flux de matériaux distincts, et donc réutilisées.

    Stijn Bollaert

    En outre, comme la structure intérieure en bois est indépendante de la structure porteuse, la maison elle-même peut évoluer au sein de son enveloppe. Le système de construction développé par BLAF permet des rénovations et des adaptations faciles, à l'instar des maisons du XIXe siècle, avec leurs murs en briques pleines et leur structure et matériaux intérieurs en bois. Ces maisons à murs pré-cavés ont été une source d'inspiration sur laquelle BLAF a commencé à travailler activement lors du développement de ce qu'ils appellent eux-mêmes leurs "Big Brick Hybrids" : une série de maisons, dont DnA a été la première, qui sont toutes construites de la même manière. C'est précisément là que réside la force de la méthode. Le système est reproductible, mais chaque fois d'une manière différente, avec des matériaux biosourcés et/ou recyclés différents, dans des formes et des tailles différentes. La même chose donc, mais différente à chaque fois, avec le concepteur à la barre.

    Matériaux réutilisés et quantités

    Briques fournies par De Roover P. et installées par Nieuw-Ingels Kristof. : 50 m³

    Les briques ont été testées préalablement. Les conclusions ont montré qu'en dépit de leur âge, elles possédaient des propriétés supérieures à celles de certaines briques neuves.

    Notes

    [1] Nijs, L. (BLAF architecten), & Van Den Driessche, M. (2019). Het verlangen naar baksteen. Kritisch regionalisme heroverwogen, OASE, (103), 114–116. Extrait de: https://www.oasejournal.nl/nl/Issues/103/LongingforBrick
    [2] Nijs, L. (BLAF architecten), (2022). Paradoxes de la Brique. Back to brick, A+, (294).

    All pictures

    Crédits

    Type
    Integration
    Type de marché
    privé
    Year
    2013
    Conception
    BLAF architecten
    Implementation
    Nieuw - Ingels kristof
    Adresse

    Asse
    Belgique

    Copyrights
    Stijn Bollaert